top of page
Rechercher
Cabinet LDG

UNE PROPOSITION DE LOI CHARGEE D'ORIGINALITE



Le 7 juillet dernier, une proposition de loi portant réforme de la preuve de l’originalité de l’œuvre a été déposée au Sénat.


L’objectif annoncé ? « Rééquilibrer le partage de la charge probatoire » dans le cadre des procès en contrefaçon de droit d’auteur et restaurer une « protection effective [des artistes-auteurs] sous l’empire du droit d’auteur ».


L’ « originalité » d’une œuvre constitue la condition sine qua none d’accès à la protection au droit d’auteur depuis le XIXe siècle, bien qu’elle ne soit toujours pas consacrée en tant que telle par les textes au niveau national, européen et international (sous réserve de certaines dispositions bien spécifiques).


Or, l’exigence d’originalité est un véritable « enjeu procédural » du contentieux civil de contrefaçon de droit d’auteur, dès lors qu’à peine d’irrecevabilité de son action, il revient à l’auteur et/ou au titulaire des droits, de démontrer l’originalité de chacune des œuvres dont il sollicite la protection par le droit d’auteur, et ce, quels que soient la nature et le nombre d’œuvres revendiquées.


Dans leur rapport de mission intitulé « La preuve de l’originalité » remis au CSPLA en décembre 2020, Me Bénazéraf et Madame Barthez dressaient le constat alarmant, consécutif à cette tendance jurisprudentielle, de « l’exploitation opportuniste » de cette charge probatoire par les contrefacteurs et, partant, de l’affaiblissement de la protection au titre du droit d’auteur.


Ce constat, nous le faisons au quotidien et depuis de nombreuses années dans le cadre de notre pratique professionnelle.


Ce déséquilibre probatoire, renforcé par le caractère souvent très subjectif de la notion d’« originalité », peut décourager nos clients auteurs et/ou titulaires de droits de s’engager dans un contentieux à l’issue incertaine, du seul fait de la difficulté à leur garantir, avec un minimum de certitude, que l’originalité de leur œuvre sera reconnue par la juridiction et que leur action sera donc recevable. Et ce, non pas parce que leur œuvre serait dépourvue d’originalité (à l’évidence dans un tel cas aucune action ne doit être engagée), mais parce qu’il est souvent très (voire trop) chronophage de démontrer l’originalité de certaines œuvres (très denses ou composées de multiples éléments créatifs tels que certaines œuvres littéraires ou œuvres multimédia par exemple).


Cette réalité tout aussi juridique que pratique, doit incontestablement interroger le législateur au sujet de l’efficacité de la protection du droit d’auteur et du droit au procès équitable.


Par cette proposition de loi, la sénatrice Sylvie Robert (entre autres) reprend la solution « mesurée » privilégiée par Me Bénazéraf et Madame Barthez dans leur rapport, consistant à modifier l’article L.112-1 du Code de la propriété intellectuelle comme suit :


« Les dispositions du présent code protègent les droits des auteurs sur toutes les œuvres de l’esprit originales, quels qu’en soient le genre, la forme d’expression, le mérite ou la destination.

Il appartient à celui qui conteste l’originalité d’une œuvre d’établir que son existence est affectée d’un doute sérieux et, en présence d’une contestation ainsi motivée, à celui qui revendique des droits sur l’œuvre d’identifier ce qui la caractérise. »


Au-delà de la consécration de la notion d’originalité au sein du Code de la propriété intellectuelle (abordée uniquement en ce qui concerne la protection des titres jusqu’alors), il s’agit d’instaurer un « partage de la charge probatoire » entre le demandeur et le défendeur à l’action en instaurant « une procédure en deux temps » : (1) examen de la recevabilité de la contestation de l’originalité de l’œuvre, laquelle doit nécessairement être motivée et faire naître un doute sérieux à l’égard de celle-ci, et (2) démonstration, le cas échéant, par le demandeur, des éléments caractérisant l’originalité des œuvres en cause.


Cette proposition de loi met en place une sorte de « filtre », puisque l’originalité de l’œuvre ne sera susceptible de faire échec à la recevabilité de l’action de l’auteur qu’en cas de doute sérieux sur l’originalité de son œuvre. Reste néanmoins une question : que signifiera un doute sérieux ?


Cette proposition de loi promet, en tous les cas, des discussions et débats d’une originalité difficilement contestable… A suivre !

28 vues0 commentaire

Posts récents

Voir tout

Comments


bottom of page