La base de données est définie comme un « recueil d'œuvres [littéraire, artistique, musical, etc., de données ou d'autres éléments indépendants, disposés de manière systématique ou méthodique, et individuellement accessibles par des moyens électroniques ou par tout autre moyen » (Article L.112-3 du Code de la propriété intellectuelle).
Pour être qualifiée de base de données, il convient que chaque œuvre, donnée, élément qu’elle contient, puisse être retiré ou ajouté sans que cela n’affecte les autres œuvres, données ou éléments de cette base de données. Il importe peu que la base de données soit en format physique ou numérique.
Citons par exemple, les annuaires, les répertoires, les encyclopédies ou encore les bibliothèques.
La base de données peut bénéficier de deux types de protection prévus par le Code de la propriété intellectuelle : la protection par le droit d’auteur et la protection par le droit, dit sui generis des producteurs de bases de données.
I – Le droit d’auteur : protection du contenant
L’ article L.112-1 du Code de la propriété intellectuelle soumet à la protection par le droit d’auteur « les œuvres de l'esprit, quels qu'en soient le genre, la forme d'expression, le mérite ou la destination » dès lors qu’elles sont suffisamment formalisées – les simples idées ne pouvant donner prise au droit d’auteur – et qu’elles sont originales.
L’ originalité est une condition dégagée par la jurisprudence (Cass. Com. 11 février 1997 n°95-13.176) qui exige que l’œuvre reflète, au travers de choix artistiques libres, l’empreinte de la personnalité de l’auteur de l’œuvre.
Ainsi, une œuvre banale, ou conçue par un auteur en considération de choix purement utilitaires, ne serait pas suffisamment originale pour être protégée par le droit d’auteur.
Contrairement à une marque, un brevet ou un dessin et modèle, la protection d’une œuvre de l’esprit, et notamment d’une base de données, par le droit d’auteur, ne nécessite aucun enregistrement ou dépôt. Ces derniers restent néanmoins intéressants lorsqu’il s’agit de dater la création (enveloppe Soleau, dépôt auprès d’organismes de gestion collective, LRAR sous pli fermé adressée à un commissaire de justice - anciennement huissier etc.).
L’article L.112-3 du Code de la propriété intellectuelle soumet également à la protection par le droit d’auteur les « bases de données, qui, par le choix ou la disposition des matières, constituent des créations intellectuelles », sous réserve qu’elles soient là encore formalisées et originales.
Dans un arrêt du 7 octobre 2022 (n°20/06102), la Cour d’appel de Paris a considéré qu’une base de données composée de trois tableaux ne serait pas suffisamment originale pour être protégée par le droit d’auteur, au motif que « ni la longue élaboration des tableaux revendiquée, ni l’expérience ou la personnalité des dirigeants de la société, ni les avis donnés par des tiers quant au caractère intéressant ou novateur de la solution constitutive d’une ‘bonne idée’ ne peuvent permettre de caractériser l’originalité d’une œuvre (…). La nouveauté arguée par la société est une notion différente de l’originalité requise et ne peut servir de critère pour l’octroi de la protection au titre du droit d’auteur ».
La Cour exclut ainsi logiquement le travail, le savoir-faire et la nouveauté, des critères d’appréciation de l’originalité et rappelle que pour l’établir, la société aurait dû démontrer ce qui, dans la présentation et la structuration des données, « dénoterait d’un effort créatif et le parti pris esthétique portant l’empreinte de la personnalité de l’auteur … ».
II – Le droit des producteurs de bases de données : protection du contenu
Le producteur d'une base de données est défini par l’article L.341-1 du Code de la propriété intellectuelle, comme « la personne qui prend l'initiative et le risque des investissements correspondants » et bénéficie d’une « protection du contenu de la base lorsque la constitution, la vérification ou la présentation de celui-ci [du contenu] atteste d'un investissement financier, matériel ou humain substantiel » (CJCE 9 novembre 2004 n°C-203/02, C-338/02, C-46/02, C-444/02).
Contrairement à la protection prévue par le droit d’auteur, qui porte sur le contenant de la base de données, le droit sui generis des producteurs de bases de données peut protéger son contenu.
Contrairement au droit d’auteur, qui nécessite de démontrer l’originalité de la base de données pour bénéficier de la protection, le droit sui generis des producteurs de base de données nécessite de démontrer les investissements substantiels réalisés par le producteur de la base de données, lesquels sont entendus dans un sens très large (personnel, financement, outils utilisés, etc.).
A titre d’exemple, dans la saga opposant LBC (leboncoin) / Entreparticuliers.com, la Cour de cassation a considéré que les investissements réalisés par la société LBC étaient suffisamment substantiels pour protéger la sous-base des annonces immobilières par le droit sui generis des producteurs de bases de données (investissements publicitaires et en communication, dépenses de stockage sophistiqué, infrastructures informatiques permettant une organisation rigoureuse des seize tables de stockage, achat d’un logiciel spécifique, dépenses liées à la classification des 28 millions d’annonces) (Cass. 1ère Civ. 5 octobre 2022 n°21-16.307).
N’ayant pas le même objet, le cumul de protection du contenant par le droit d’auteur et du contenu par le droit sui generis des producteurs de bases de données, est donc parfaitement possible, comme le rappelle d’ailleurs le dernier alinéa de l’article L.341-1 susvisé.
En vertu de cette protection, et sous réserve des dispositions de l’article L.341-3 du Code de la propriété intellectuelle, le producteur de bases de données sera en droit, sous certaines conditions, d’interdire l’extraction ou la réutilisation d’une partie qualitativement ou quantitativement substantielle du contenu d’une base de données ou de parties non substantielles lorsque cela excèdera manifestement les conditions d’utilisation normale de la base de données.
Précisons en dernier lieu que les sanctions pénales et civiles attachées à la contrefaçon d’une base de données sont similaires dans les deux types de protection (amende, peine d’emprisonnement et dommages et intérêts accordés à la victime).
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