Par décision du 20 octobre 2021 (Civ. 1ère, 20 octobre 2021, n°20-16.343) la Cour de cassation confirme le régime juridique hybride attaché au droit à l’image, régi par l’article 9 du Code civil (protection de la vie privée) et dont les conditions d’exploitation relèvent de la liberté contractuelle.
Contexte factuel : une candidate de jeu de téléréalité de survie juge qu’une séquence filmée et diffusée auprès du public lui porte préjudice et excède les limites de l’autorisation contractuellement consentie au producteur.
Contexte juridique : le droit à l’image, droit de la personnalité (en principe) extra-patrimonial, régi par l’article 9 du Code civil, permet à toute personne de s’opposer à la captation, la conservation, la reproduction et à l’utilisation de son image sans son consentement et, plus positivement, lui permet d’autoriser l’exploitation de son image, souvent contre rémunération.
Questions posées/réponses apportées :
La séquence excède-t-elle les limites de l’autorisation consentie par la candidate à la production ? En l’espèce non.
Le préjudice subi par la plaignante doit-il être examiné et sanctionné sur le fondement contractuel (non-respect du contrat) ou délictuel (faute extracontractuelle) ? Fondement contractuel.
Explications :
La cession du droit à l’image (autorisation d’exploiter l’image d’une personne aux conditions convenues entre les parties) obéit à un régime juridique essentiellement prétorien, puisque contrairement à la cession de droits d’auteur par exemple, aucun texte spécial ne règlemente les autorisations portant sur le droit à l’image.
Les tribunaux se sont donc gardés de transposer purement et simplement les dispositions applicables au droit d’auteur au droit à l’image et privilégient la liberté contractuelle et le droit commun des contrats pour apprécier de la licéité d’une cession de droit à l’image.
En l’espèce, l’arrêt du 20 octobre 2021 confirme la jurisprudence de la 1ère Chambre civile du 11 décembre 2008 (n° 07-19.494), considérant que « les dispositions de l'article 9 du code civil, seules applicables en matière de cession de droit à l'image, relèvent de la liberté contractuelle et ne font pas obstacle à celle-ci dès lors que les parties ont stipulé de façon suffisamment claire les limites de l'autorisation donnée quant à sa durée, son domaine géographique, la nature des supports et l'exclusion de certains contextes ».
La Haute Cour confirme le raisonnement de la Cour d’appel, qui avait retenu que « la séquence litigieuse avait été filmée dans le contexte et pour la finalité en vue desquels avait été réalisé le tournage de cette émission et qu'elle entrait ainsi dans les prévisions contractuelles indiquant qu'il s'agissait d'une chronique filmée d'un jeu d'aventure ».
Elle rappelle également, sans surprise, qu’en présence d’un contrat de cession de droit à l’image, l’action en réparation de l’atteinte invoquée au droit à l’image doit être réalisée sur un fondement contractuel et non délictuel.
Conclusion :
En somme, la liberté contractuelle qui préside en matière de droit à l’image est quelque peu limitée par la nécessité de délimiter contractuellement le périmètre de la cession.
On ne peut qu’être frappé par les similarités avec les dispositions protectrices de l’article L.131-3 du Code de la propriété intellectuelle, en vertu duquel la cession de droits d’auteur est limitée aux droits et modes d’exploitation expressément prévus au contrat.
Bien que leur régime ne soit pas identique, la rédaction des contrats de cession de droit à l’image nécessite donc une attention tout aussi importante que celle des contrats de cession de droits d’auteur…
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